Le 1er avril 2025 a eu lieu la 17e édition du Forum végétable, animée par les journalistes Florence Rabut et Emmanuelle Pellé.
Une édition dynamique qui rassemble 130 acteurs de la filière fruits et légumes pour s’interroger sur les leviers afin de relancer leur consommation en France, rythmée par les interactions entre le public et les intervenants des tables rondes dans une ambiance détendue.
Une spirale de déconsommation
Pascale Hébel, directrice de C-Ways, a introduit la séance en livrant son analyse des dernières évolutions de la consommation alimentaire. Il y a un effet de génération sur la consommation de fruits et légumes et un cercle vicieux de déconsommation. Le temps passé aux process alimentaires se réduit peu à peu et les prises hors repas progressent. « C’est une question d’offre et d’accès. Le maître mot c’est l’innovation, il faut proposer des choses prêtes à consommer, le plus accessible possible et déculpabilisant sur le manque de connaissance en cuisine. » L’experte note une perte de lien avec ces produits et de savoir-faire culinaire : manger des légumes paraît compliqué pour beaucoup de personnes. Il faut, de fait, arriver à proposer des produits plus faciles à acheter et consommer, sous forme prédécoupée par exemple, pour donner une facilité d’accès aux fruits et légumes.
Offrir de la praticité
Dès 2018, Priméale a lancé la pomme de terre minute, présenté par Angélique Aubry, responsable marketing et développement. La gamme a trouvé du succès auprès des consommateurs et a, depuis, été élargie à d’autres légumes (carotte, choux de Bruxelles…) répondant à la problématique de temps de cuisine. Au cours de l’après-midi a été présenté le concept de nudge. Un marketing social qui incite le consommateur à faire de bons choix et à faciliter le travail de réflexion concernant la préparation des repas. Le développement de la fraîche découpe répond aussi à la demande de praticité des consommateurs et illustre l’importance croissante du serviciel dans le secteur. Bien que cela questionne sur la répartition de la valeur ajoutée qui peut glisser vers l’aval.
Promouvoir les bienfaits… sur TikTok ?
Les fruits et légumes sont essentiels pour la santé, mais l’image véhiculée par les pesticides, notamment chez les plus âgés, est source d’inquiétude. « Il faut remettre l’église au milieu du village, ce n’est pas manger des fruits et légumes qui est mauvais pour la santé, c’est ne pas en manger ! » affirme Rémi Langlois, artisan primeur chez Natur’Halles. Bien que le Nutri-Score soit interdit pour les produits bruts en France, leur valeur nutritionnelle reste un atout à promouvoir. « Nous engageons nos clients dans une démarche positive, hors des injonctions, avec une pédagogie active sur les réseaux sociaux », explique Laure Lapostolle, directrice générale adjointe de Quitoque qui propose la livraison à domicile de paniers à cuisiner. Les intervenants se sont accordés sur la nécessité d’une présence en ligne pour faire la promotion des fruits et légumes, ce qui permet de toucher un large public et d’engager les consommateurs, notamment les plus jeunes.
« Mon premier, c’est désir… »
Le slogan « Mangez 5 fruits et légumes par jour » est essentiel et a été entendu par la jeune génération. Mais l’un des messages à retenir de ce forum est qu’il ne faut pas passer à côté du plaisir d’en consommer. « Ce sont des produits sous-estimés. En restauration collective nous avons un poids énorme pour montrer le chemin », note Carole Galissant, directrice transformation alimentaire et nutrition de Sodexo, qui sert 80 millions de repas par jour. En grande distribution, l’achat de fruits et légumes peut sembler technique avec l’affichage du calibre et de la catégorie, ce qui est imposé par la réglementation. « Il faut arrêter de parler technique, parlons gustatif et culinaire », souligne Bertrand Morand, responsable filières et partenariats de Coopérative U. Cela suggère de travailler sur la segmentation par instant de consommation ou la destination culinaire. La théâtralisation des fruits et légumes exerce par ailleurs une influence dans la perception de leur fraîcheur, critère fondamental dans les actes d’achat.
Améliorer l’expérience client en rayon
Les meubles réfrigérés améliorent la conservation des fruits et légumes, bien qu’ils puissent avoir un aspect moins accueillant. « Il y a une vraie différence culturelle entre pays anglo-saxons et méditerranéens sur la réfrigération en rayon », souligne Jérôme Tisserand, responsable de l’axe de recherche techniques de vente et perception du consommateur en magasin pour le CTIFL. Les dégustations en libre-service en magasin stimulent les ventes et l’animation, avec une rentabilité prouvée à partir de 9 clients conseillés par heure, selon une étude du CTIFL. « Les animations sont des leviers pour les produits qui ne sont pas des réflexes d’achats, comme l’ananas », observe Bastien Gelin, directeur général du groupe Yabe (enseigne Carrefour). D’autres initiatives pour apporter du service au client, vu notamment chez nos voisins européens, ont été présentées au cours de la journée.
Comme l’a bien résumé, en conclusion, Marc-Henri Blarel, fondateur de Fresh Data, « les innovations doivent être faciles à mettre œuvre, répondre à un besoin réel et être rentables. Personne n’y arrivera seul, l’enjeu collectif est considérable. » Et puisque l’on parle de collectif, pour clôturer la journée, C’est qui le patron ?! a présenté sa démarche solidaire, en présence de Nicolas Laurent, producteur de cerises et Elsa Satilmis, consommatrice sociétaire. « Une aventure transparente pour que les centimes arrivent jusqu’aux producteurs », comme l’indique Nicolas Chabanne, son fondateur. L’initiative accompagne désormais la filière cerises.
Vous retrouverez plus d’informations dans le magazine d’avril, à travers l’interview du mois sur Nicolas Chabanne. Et un article spécial Forum végétable est à venir dans notre édition de mai.
