Résurgence du scorbut !

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    Le scorbut revient en France, signe inquiétant de l’augmentation de la précarité socio-économique depuis 2020.

    caddie d'oranges
    © Africa Studio

    Les résultats d’une récente étude, publiés dans la revue The Lancet Regional Health – Europe, le 6 décembre 2024, mettent en lumière le retour du scorbut en France et les possibles conséquences de l’augmentation de la précarité socio-économique depuis 2020 sur l’état nutritionnel des enfants en France.

    Rappelons que le scorbut est une maladie causée par une carence profonde en vitamine C, notamment liée à une consommation insuffisante de fruits et légumes frais. Cette maladie, touchant historiquement les marins, avait pratiquement disparu à la fin du XXe siècle dans les pays à haut revenu, en particulier en Europe. Elle peut provoquer, entre autres, des douleurs osseuses intenses, une faiblesse musculaire invalidante, des hémorragies et une altération de l’état général.

    L’impact inattendu de la pandémie de Covid

    La réémergence du scorbut peut être liée à différentes causes, incluant des facteurs environnementaux, sociaux, mais aussi liés aux habitudes alimentaires. Il faut également souligner l’impact inattendu de la pandémie de Covid, et des crises socio-économiques et politiques mondiales qui l’ont suivie, sur l’aggravation de l’insécurité alimentaire. Ainsi, en France, l’inflation des prix alimentaires a atteint 15 % au début de 2023, touchant particulièrement les familles précaires.

    Une étude sur l’augmentation de cette maladie chez les enfants, en France depuis 2020, a été menée sur des patients mineurs atteints de scorbut et de malnutrition sévère pendant une période de neuf ans par les équipes de pédiatrie de l’hôpital Robert-Debré AP-HP, de l’Inserm, de l’université Paris Cité et du département de pédiatrie de l’hôpital Cayenne en Guyane. L’étude a également analysé l’évolution de la malnutrition, en différenciant les formes sévères des formes modérées et légères.

    Malnutrition sévère

    L’étude couvre deux périodes distinctes : pré-pandémie (2015-2020) et post-pandémie (2020-2023). Les facteurs socio-économiques tels que l’indice des prix à la consommation ont été intégrés pour évaluer les corrélations avec l’incidence des maladies. Un total de 888 patients atteints de scorbut a été hospitalisé, dont l’âge moyen était de 11 ans. L’augmentation des hospitalisations est estimée à 34,5 % après le début de la pandémie de Covid-19. Par ailleurs, la hausse des cas de malnutrition sévère, estimée à 20,3 %, conforte le lien du scorbut avec une dégradation de l’état nutritionnel des enfants.

    L’augmentation des cas de scorbut et de malnutrition sévère était associée à une aggravation de la précarité socio-économique et de l’inflation. Cette association ne constitue pas nécessairement une relation causale, bien que plausible. À la suite des résultats de cette étude, des recommandations pourraient être proposées, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de programmes d’aide alimentaire ciblés, l’amélioration de l’accès à des aliments nutritifs et financièrement abordables, ainsi qu’un renforcement de la formation clinique pour la prévention et la détection précoce des carences alimentaires.